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Verlaine & Kaspar Hauser
Kaspar Hauser (noté aussi Gaspar ou Gaspard) est une énigme historique. Il a vécu jusqu'à 17 ans enfermé dans une cave, sans aucun contact avec le monde extérieur, nourri par un inconnu. Trouvé errant dans les rues de Nuremberg en 1828, en habit de paysan avec une lettre à la main destinée à un capitaine de cavalerie, il fut sans doute assassiné en 1833 mais ce n’est que l’hypothèque la plus probable. Comme le Masque de fer, on ne connaît toujours pas sa véritable identité.
Werner Herzog a réalisé en 1973 un film sur ce sujet "L'Enigme de Kaspar Hauser".
Bien sûr, les hypothèses ont fleuri sur son identité, on a découvert en 2000 un cachot dans le château de Beuggen près de Rheinfelden où il aurait pu être retenu et on a même effectué en 1996 des prélèvements d’ADN qui n’ont rien donné. Certains lui voient même une origine princière.
C’est sans doute ses rapports compliqués avec les femmes et mais plus sûrement avec la société de son temps qui pourraient expliquer que Paul Verlaine se soit senti proche de cet homme qui lui non plus n’a jamais trouvé sa place dans la société et mourut mystérieusement.
Dans ce court poème, son héros est un homme incompris aussi bien des femmes que de ses congénères, fuyant sa triste vie dans la guerre et le désir d’y mourir. Mais même la mort n’a pas voulu de lui et il traîne son spleen en priant le ciel pour trouver la paix.
Il faut noter également que, lors de l’écriture de ce poème, Paul Verlaine se trouvait alors dans une période dépressive de sa vie, en prison pour avoir tiré au revolver sur Arthur Rimbaud, trainant son geste et sa jalousie comme une malédiction.
Gaspard
Je suis venu, calme orphelin,
Riche de mes seuls yeux tranquilles,
Vers les hommes des grandes villes :
Ils ne m'ont pas trouvé malin.
A vingt ans un trouble nouveau,
Sous le nom d'amoureuses flammes,
M'a fait trouver belles les femmes :
Elles ne m'ont pas trouvé beau.
Bien que sans patrie et sans roi
Et très brave ne l'étant guère,
J'ai voulu mourir à la guerre :
La mort n'a pas voulu de moi.
Suis-je né trop tôt ou trop tard ?
Qu'est-ce que je fais en ce monde ?
Ô vous tous, ma peine est profonde :
Priez pour le pauvre Gaspard.
Moustaki Album Le Métèque Reggiani Album Et Puis
Ce poème a été mis en musique pat Georges Moustaki, inclus dans son album "Le Métèque". Serge Reggiani a fait de cette chanson sur le Pauvre Gaspard, une excellente reprise en 1968 sur son album "Et puis".
Voir aussi ► Brassens & Verlaine, Colombine --
►
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<< Christian Broussas •• Brassens et Verlaine © CJB °°° 02/08/2022 >>
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Balade au Monêtier-les-Bains, Hautes-Alpes
Le Monêtier-les-Bains
Ah, même par ces grandes chaleurs, on respire bien au Monêtier, à quelque 1500 mètres d’altitude, situé si j’en crois un panneau sur le 45ème parallèle, dans le domaine de Serre-Chevalier.
Notre-Dame de l’Assomption Devant notre hôtel
On ne se sent pas vraiment écrasé et pourtant on est quand même entouré d’immenses montagnes sillonnées de cols parfois abrupts qui caracolent jusqu’au sommet, les cols du Lautaret et du Galibier d’un côté, et pour ne citer que les principaux, le Granon et l’Izoard de l’autre.
Lieu paradisiaque pour le tour de France.
Les grands cols de la région
L’été Le Monêtier gonfle de ses touristes et de plus est limitrophe du Parc national des Écrins, avec une maison du parc et des départs de circuits de balades pour randonneurs et alpinistes voulant effectuer des courses dans le massif de l'Oisans, situés au hameau du Casset, au bas du Lautaret.
Le bourg est centré sur L'église Notre-Dame-de-l'Assomption, édifice datant de la fin du 15ème siècle, modifié à plusieurs reprises au cours du 19ème siècle etclassé monument historique dès 1913. Descendant la grande rue après Notre-Dame ou accoudé au balcon de notre chambre d’hôtel, je ne me lasse pas d’admirer la majesté des montagnes qui entourent le village.
Un petit tour en Italie
De Briançon, c‘est un saute-mouton par Montgenèvre pour passer en Italie et dévaliser les magasins de Suse (ou Suze). Ensuite, c’est une descente interminable (qu’il va falloir remonter) vers le "graal suzien", ses gâteaux et ses alcools.
Le centre de la ville est dominé d'un côté par le château de Suse [1] et de l'autre par un pic rocheux où se dresse le fort de Brunette et le mont Rochemelon.
Vue du centre ville de Suse Le temple du ravitaillement
Après notre hold-up gastronomique italien, arrêt à Montgenèvre où on peut voir le longiligne obélisque offert par Napoléon 1er lors de l'inauguration de la route de Montgenèvre. À noter que l’édifice a été détruit et reconstruit dans les années 1830 et que les plaques commémoratives en bronze sont gravées en 4 langues, français, italien, espagnol et latin.
Montgenèvre rue centrale & clocher
Le bourg est également dominé par des fortifications qui imposent leur énorme masse dans le paysage, en particulier le fort du Gondran et le fort du Janus.
Vers le lac d'Eygliers
Le lendemain, nous prenons la direction de la haute vallée de la Durance, de Briançon à Mont-Dauphin. La route s’insinue doucement dans un paysage où les montagnes sont moins hautes, les villages défilent le long de la Nationale 94, L’Argentière la Bessée et ses anciennes mines d’argent, dans un lacet on découvre l’imposante sculpture d’Edward Whymper de Christian Burger, [2] et sur la droite, en hauteur la tour de l’horloge des Hermes. Puis se profilent La Roche de Rame avec son lac naturel le long de la route nationale et l’objet de notre randonnée, le lac d'Eygliers.
Tout près de là, on peut admirer la fontaine pétrifiante de Réotier offrant de belles perspectives, aussi bien sur la vallée que le site lui-même, que nous avons visité lors d'un voyage précédent.
Tour-horloge des Hermes Edward Whymper de Christian Burger
Le lac d’Eygliers, ou lac des Iscles, n'est pas très grand mais bien proportionné et on peut en faire le tour sans difficultés. On peut se baigner ou se balader aux alentours, jusqu'au camping attenant, se faire bronzer, lire un bouquin à l’ombre des nombreux arbres qui constellent le lieu ou au soleil ou pourquoi pas, aller méditer dans la petite île reliée par un pont. Tout un programme.
Pour un programme plus sportif, on peut aussi louer canoë, kayak, pédalo, paddle… pour faire le tour du lac et se faire un peu les muscles. Pour des plaisirs plus roboratifs, deux restaurants sont installés sur le site où l’on peut aussi profiter en terrasse du soleil donnant dans la vallée.
En route pour le Granon :
Ça monte, ça monte… même en voiture. Le Granon, au-dessus de Briançon, c’est pentu, c’est étroit, il faut appuyer sur la pédale… de frein, dans la descente. On monte prudemment en doublant les quelques rares cyclistes qui s’y aventurent.
La récompense tout en haut, c’est un paysage qui s’ouvre sur un immense horizon, en particulier le massif du Pelvoux où subsistent quelques traces de neige, c'est aussi l'impression qu'on est arrivé au bout de quelque chose, la route n'allant d'ailleurs pas plus loin.
Bar-resto au sommet Table d'orientation & sculpture
Même si le sommet assez pelé a des allure de fin du monde, la route n'allant pas plus loin, il y a quand un bar-restaurant qui permet de se restaurer, de se désaltérer en se gorger de la beauté des fières montagnes qui encerclent le site. On peut aussi grimper juste au-dessus où sont implantées des sculptures et une table d'orientation.
Vues à partir du sommet du Granon
Le hameau du Casset :
Le hameau du Casset est situé entre le col du Lautaret et Monêtier les bains, 1512 mètres d’altitude. Dominé à l’est par le massif des Cerces, il est le point de départ vers la vallée du Petit Tabuc, le col d'Arsine et le Parc national des Écrins.
L'église du Casset
Ce qu’on voit d’abord, c’est le clocher élancé de son église. Les maisons sont serrées les unes contre les autres dans des ruelles assez étroites. Au centre, une maison intéressante avec l’inscription "café des glaciers Jourdan". Plus loin, on passe un petit pont sur la Guisane, décoré de jardinières fleuries qui débouche sur un petit musée.
Fleurs le long de la Guisane
Le musée nous donne un aperçu du thermalisme et des deux sources du Monêtier, la situation géographique du village avec la Guisane, le torrent du petit Tabuc, le vallon glaciaire dominé par le glacier du Casset. Ils présente aussi les rouets en fonction à l’époque, avec deux paires de meules horizontales, les moulins pour le blé et pour l’orge, les blutoirs pour les moutures de céréales, une "pierre lourde", meule verticale pour broyer les fruits à noyaux…
Entrée parc des écrins Pont de bois sur la Guisane
Notes et références :
[1] Appelé maintenant château de la comtesse Adélaïde
[2] Sculpture Edward Whymper de Burger --
Voir aussi : ► Monêtier Le Casset -- Dans les Hautes-Alpes -- Petit Tabuc --
► Les gorges du Verdon -- Les gorges de l’Allier --
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<< Christian Broussas •• Monêtier les Bains © CJB °°° 10/08/2022 >>
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Bernard Clavel et Naidra Ayadi
De Clavel à Naidra Ayadi : la descente aux enfers d’un père
« Ce père ressemble à beaucoup d’hommes que j’ai connus. » Roschdy Zem
Référence : Naidra Ayadi, Ma fille, 2018, réalisation et scénario Naidra Ayadi et Bernard Clavel, photographie Guillaume Schiffman, avec dans les rôles principaux Roschdy Zem (le père), Natacha Krief (la jeune fille) et Darina Al Joundi (la mère)
Affiche du film Bernard Clavel Roschdy Zem
Bernard Clavel deviendrait-il un classique à revisiter ? Un peu comme on joue Molière dans des versions modernes. C’est en tout cas le pari de Naidra Ayadi la réalisatrice du film Ma fille, dont le scénario s’appuie sur Le voyage du père, le roman de Clavel paru en 1965.
Pas sûr que Bernard Clavel eût apprécié, lui qui n’avait déjà guère goûté la version ciné de Denys de La Patellière avec Fernandel dans le rôle du père. Grincements des dents du père Clavel choqué par les licences prises par rapport à l’histoire initiale, en particulier le retour du père dans son Jura natal, voûté, seul, déboussolé, qui n’avait certes aucune envie dans le train du retour de discuter avec quiconque.
Le voyage du père : Le roman de Clavel et le film de 1966
Cette fois, le lien est encore plus distendu puisqu’il s’agit d’une famille d’immigrés algériens qui a fui la guerre civile dans les années 1990 avec leur petite fille Leïla âgée d’un an. Ils s’installent à Paris, le temps que Hakim trouve du travail dans une scierie jurassienne où il est devenu contremaître. Leïla a grandi et depuis peu, elle est repartie à Paris pour devenir coiffeuse.
Naidra Ayadi et Roshdy Zem
Mais elle ne donne presque plus de nouvelles, quelques mots pour rassurer la famille et vient d’annoncer à sa petite sœur Nedjma que, prise par son travail, elle ne pourra les rejoindre pour les fêtes de fin d’année. Colère de Latifa la mère qui n’admet pas l’absence de sa fille. Hakim est sommé d’aller la récupérer et Nedjma obtient finalement de l’accompagner.
Mais surprise : Leïla est introuvable, injoignable. Personne chez elle, inconnue au salon de coiffure où elle prétendait travailler. Angoisse du père qui s’obstine à ne pas vouloir comprendre. Peu à peu, il entrevoit une vérité inacceptable qu'il ne pourra jamais avouer à personne.
"Ma fille" au festival d’Angoulême Naidra Ayadi et le producteur Maxime Delaunay
L’opposition entre l'univers rural qu'aimait Clavel et l'univers urbain qu'il avait tendance à fuire, s’est bien atténuée depuis les années 60. Mais dans un autre domaine, alors que Clavel traitait le sujet avec beaucoup de pudeur, le film nous entraîne dans le monde souvent sordide des nuits parisiennes dans des scènes parfois fort osées qui n'apportent pas grand chose à l'ensemble. On y côtoie des petits voyous sans grande envergure, une généreuse prostituée dans des bars louches et des clubs échangistes.
Au-delà de ce que cette histoire révèle de ses faiblesses, l’essentiel réside dans ce père déconcerté par l’effritement des valeurs auxquelles il tenait. Par amour pour ses filles, il parviendra à surmonter ces épreuves pour ne pas s’éloigner d’elles définitivement.
Fait social, c'est aussi conflit de générations dans une société qui évolue trop vite pour les parents et où la jeunesse ne trouve pas forcément sa place. On retrouve ainsi avec quelques variantes, le fil conducteur de Clavel sur les évolutions de la société et le choc des générations.
Naidra Ayadi, Roshdy Zem, Natacha Krief Avec Thierry Ardisson [1]
Notes et références :
[1] C’est Thierry Ardisson qui le premier a eu envie de réadapter le roman de Clavel au cinéma, touché par cette histoire qui lui rappelait son père.
Voir aussi : ► Hommage à Bernard Clavel -- Du côté de Guérande -- La Courbatière -- Capian --
► Clavel, Terres de mémoire -- Le lac de Bonlieu -- Les feux de Courmangoux --