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Frachet
10 septembre 2020

Nina Bouraoui, Otages

Référence : Nina Bouraoui, Otages, éditions Jean-Claude Latès, 170 pages, janvier 2020, Prix Anaïs Nin 2020

                

Nina Bouraoui parle dans ses romans de l'amour et du désir, l'exil et la nostalgie de son enfance algérienne, de sa quête d'identité qui lui vient de son homosexualité et de sa double culture franco-algérienne.
Son évolution est marquée dans un premier temps par un style très travaillé et des thèmes forts [1], qui font place à un cycle d'autofiction dominé par un style plus nerveux et une narration plus centrée sur l'amour et le désir [2].

Elle renoue avec le thème de l'amour en 2014 avec Standard, histoire d'un amour tragique entre Bruno Kerjen et Marlène puis en 2016 avec Beaux Rivages qui analyse la séparation d'un couple après huit années de vie commune et avec la biographie dans Tous les hommes désirent naturellement savoir en 2018, une jeunesse écartelée entre la Bretagne natale de sa mère et l'Algérie de son père.

                    

Le basculement d'une femme ordinaire.

Dans Otages, Sylvie Meyer a tout subi, tout accepté jusqu’à présent dans sa vie. On pourrait dire qu’elle est sans grande défense et répugne à se battre : elle passe pour être modeste et ponctuelle, sans grande ambition, plutôt gentille, sur qui on peut compter. Rien que des qualités peu adaptées au « struggle for life », où il faut combattre pour se faire "une place au soleil".

                  

Âgée d’une cinquantaine d’années, elle a été abandonnée par son mari, après des années de vie commune et deux enfants. Elle n’a rien dit, tout encaissé comme si ça allait de soi, comme si seul comptait l'image qu'elle renvoyait. Puis, dans son entreprise en difficultés,  la Cagex, une entreprise de caoutchouc, où elle s’occupe de la section des ajustements, elle a tout accepté, se pliant aux volontés patronales pendant  trop longtemps,  acceptant par exemple de surveiller ses collègues, avant d’être confrontée à la mission de trop.

Mais au fond d’elle-même se sont accumulés ressentiments et haine générateurs de violence. Un jour, elle est prise d’une crise subite. C’est pour elle un révélateur et au lieu de la désespérer, ce tournant dans sa vie lui donne de nouvelles forces.
D'abord écrit pour le théâtre, ce texte a été refondu pour devenir ce roman centré sur le portrait d’une femme dont les difficultés de la vie obligent à se remettre en cause et à refuser dorénavant de se soumettre.

                         

Pendant trop longtemps, elle n’a pas protesté, faisant ce qu’on attendait d’elle jusqu’à ce matin de novembre où tout est remonté à la surface, où la violence des autres et l’injustice se conjuguent à sa solitude. Elle n’a alors plus de limites et une nuit, son pouvoir de destruction va se déchaîner, au-delà de toute considération de retenue ou de conséquences possibles. En tout cas, Sylvie dans ces moments-là, se sent revivre.

L'intérêt réside aussi dans ces incursions dans l’intime de Sylvie, la lente description du manque qu’elle ressent, ce subtil sentiment qui la pousse à planquer toute sa frustration au tréfonds d’elle-même jusqu’à ce que la souffrance ne soit plus supportable.
L'histoire d'une libération, quelle qu'en soit le prix.

               

Commentaires et critiques
« Nina Bouraoui d’une écriture précise, finement ciselée, nous offre un texte délicat,  juste et libérateur sur les violences intérieures. »  Madame Figaro
« Nina Bouraoui signe un roman social et politique fort »  L'Express
« Nina Bouraoui signe le portrait singulier et redoutable d'une femme qui porte en elle une révolte, celle des invisibles, otages d'une vie étouffante.» Le Parisien Week-End
«  Nina Bouraoui signe un de ses plus forts livres, en phase avec notre société  »  Le Parisien

 
La version théâtrale avec Anne Benoît

Notes et références
[1] Voir par exemple La voyeuse interdite, Poing mort, Le Bal des murènes ou L'âge blessé
[2] Dans des romans comme Le jour du séisme, Garçon manqué, La Vie heureuse, Poupée Bella ou Mes mauvaises pensées, prix Renaudot 2005

Quelques fiches sur les écrivaines
* Cécile Coulon -- Muriel Barbery, Une rose seule --
* Marianne Chailland, Amélie Notomb --
* Elena Ferrante, La vie mensongère des adultes --

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