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Frachet
22 juillet 2022

Orhan Pamuk, Les nuits de la peste

Référence : Orhan Pamuk, Les nuits de la peste, éditions Gallimard, Collection Du monde entier, traduction Julien Lapeyre de Cabanes, 688 pages, mars 2022

           

Tout commence par l’assassinat de Bonkovski pacha sur l'île de Mingher. « La princesse Pakizê et son mari, tels deux héros de ces romans de détectives dont raffolait le sultan, déployèrent beaucoup d'énergie et d'intelligence pour essayer de résoudre l'énigme du meurtre de Bonkowski Pacha. » Pakizê  soupçonne son oncle le sultan Abdülhamid, d’avoir fait exécuter Bonkowski Pacha et même son mari ne parvenait pas à la dissuader du contraire.

          

Avril 1901 : la peste s’est déclarée à Mingher, une île turque que l'auteur situe au large de Rhodes. Le sultan Abdülhamid II y envoie ses meilleurs limiers pour juguler le danger et imposer des mesures sanitaires qui se heurtent parfois aux pratiques religieuses. Le fléau tend à augmenter les tensions entre musulmans et orthodoxes.

      Avec Leila Slimani

En tout cas, Mingher, celle qu’on appelle parfois la « perle de la Méditerranée orientale », va vivre une situation très difficile. « À
présent, songeait le docteur Nuri, la violence de la peste et l'étendue de sa victoire leur avait ôté jusqu'au goût de l'espoir. Les liens se distendaient, les relations s'étiolaient, l'envie était pauvre de se faire des amis, d'apprendre de nouvelles choses, même de réagir aux rumeurs. A chacun suffisait sa peur, ses blessures, son chagrin. Les voisins mouraient dans l'indifférence. » [1]

                       

Dans un mélange de fiction et de réalité, l’île de Mingher est l’occasion pour Pamuk de brosser une grande fresque historique sur le déclin de l’Empire ottoman, une crise sanitaire qui peut cacher une autre crise de nature politique.

Cet ouvrage, basé paraît-il sur les documents d'une fille d'un ancien sultan déchu et en plus femme d’un des médecins dépêchés sur place, est à la fois un récit historique sur le déclin inéluctable de la Turquie, un roman policier à la Sherlock Holmes, un livre politique aux réflexions sur le nationalisme et un roman noir mêlant mort et sentiment.

                     

À la fois panorama onirique, historique et réflexion ironique, Les nuits de la peste constitue une fresque aussi magnifique que pessimiste qui met en scène des personnages nombreux aux comportements particulièrement fouillés où se mêlent l’amour, l’histoire avec la fin de l’Empire ottoman et le roman policier.
Dans ce drame sanitaire et social, dans ces bouleversements, l’amour constitue comme un refuge et l’auteur nous propose une réflexion sur les thèmes du pouvoir et de la liberté dans une société qui peu à peu se délite.

          
                                                Avec sa fille Rüya Pamuk [2]

Notes et références
[1] La peste était déjà présente dans l’œuvre d’Orhan Pamuk : dans
La Maison du silence, sous l’empire ottoman, ou dans Le Château blanc, sur la peste à Istanbul au XVIIème siècle. Il a déclaré que « la peste m’intéressait en tant que réflexion métaphysique sur la mort, le sens de la vie, l’existence de Dieu. (…) J’ai voulu évoquer l’imposition d’une quarantaine et les problèmes que cela pose ».
[2] Sa fille est l’héroïne de son roman "Livre noir" publié en 1990

 Voir aussi mes fiches :
Document utilisé pour la rédaction de l’article Orhan Pamuk et ses romans Le musée de l'innocence, Neige et Mon nom est rouge.
Document utilisé pour la rédaction de l’article La femme aux cheveux roux -- Cette chose étrange en moi --

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