La Collection Morozov

Collection MOROZOV, Icônes de l’art moderne.

           
                                     La fondation Louis Vuitton

Après l'exposition marquante consacrée à la collection Chtchoukine par la Fondation Louis Vuitton en 2016/2017, c'est au tour de la collection Morozov de faire l'objet d'une grande exposition consacrée à la collection Morozov, les deux frères russes Mikhaïl Abramovitch Morozov (1870-1903) et Ivan Abramovitch Morozov qui avaient réuni une extraordinaire collection d'impressionnistes et d'art moderne, avant d'être démembrée par le pouvoir soviétique.

Œuvres de Vincent van Gogh
             
La mer aux Saintes-Maries 1888               Café de nuit à Arles 1888

Cet événement, toujours dans le cadre Icônes de l'art moderne, est organisé en partenariat avec le Musée d’État de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg, le Musée d’État des Beaux-Arts Pouchkine de Moscou et la Galerie nationale Trétiakov de Moscou.

                       
Paysage d'Auvers après la pluie 1890        Valentin Sérov Portrait d'Ivan Morozov 1910

Présentée pour la première fois hors de Russie, cette collection permet d'admirer des œuvres importantes des impressionnistes et post impressionnistes français de Cézanne, Gauguin, Van Gogh, Renoir, Monet, Bonnard, Denis, Matisse, Derain et Picasso ainsi que des peintres représentatifs de l’avant-garde russe tels que Vroubel, Malevitch, Répine, Larionov, Sérov. [1]

                        
Renoir Jeanne Samary en pied et son portrait 1877     Louis Valtat  La mer à Anthéor 1907

Parmi les œuvres les plus importantes, on peut citer pêle-mêle plusieurs portraits de Renoir, douze toiles de la période tahitienne de Gauguin, l’imposant triptyque La Méditerranée de Pierre Bonnard, des tableaux de Van Gogh et Munch, Les Baigneurs, Le Fumeur et des paysages provençaux de Cézanne, le Triptyque marocain et des natures mortes de Matisse, des pastels de Degas, des sculptures de Rodin… et de nombreuses œuvres réalistes et symbolistes de peintres russes, de Vroubel à Serov.

Œuvres de Pablo Picasso
                                     
Les deux saltimbanques 1901    L'enfant à la boule 1905         Ambroise Vollard 1910

Du beau monde pour une exposition qui met en valeur quantité de tableaux vraiment magnifiques. Pour prendre un autre exemple hors des impressionnistes, on pourrait retenir Pablo Picasso, illustré par les reproductions ci-dessus. Et cette liste n'est pas limitative. On trouvera d'ailleurs dans l'article ci-dessous consacré à "la dynastie moscovite des Morazov" d'autres exemples tout aussi intéressants et significatifs de l'importance de cette collection.

           
Claude Monet Étang à Montgeron, 1877 et Coin de jardin à Montgeron, 1876

L'exposition est vraiment un modèle du genre et dotée de moyens considérables : pas moins de deux cents tableaux, des dessins, des sculptures et des photographies documentaires dont des inédits comme ces négatifs de Maurice Denis sur l’installation de ses œuvres à Moscou.

                    
Claude Monet Bd des Capucines 1873    André Derain, Le séchage des voiles, Collioure, 1905

Elle comprend également des traductions nouvelles de textes russes, Gorky par exemple, et des concerts d’inauguration joués par l’orchestre du Mariinsky de Saint-Pétersbourg, sous la direction de Valery Gergiev.

       
Paul Gauguin, La femme au fruit 1893, Pastorales tahitiennes et café à Arles 1888

La dynastie moscovite des Morozov

Cette famille s'est enrichie dans la production textile au début du XIXe siècle. Si Mikhaïl Abramovitch Morozov (1870-1903), mort à 33 ans, soutint très tôt des artistes russes comme Levitan, Nesterov, Vroubel et Serov, il fut également un amateur précoce des œuvres de Gauguin, Van Gogh et Bonnard, influençant son frère cadet Ivan (1871-1921) qui resta assez longtemps dans l’ombre de Sergueï Chtchoukine.

                         
Mikhaïl Vroubel Portrait de sa femme, 1898
Constantin Korovine Portrait d’une choriste 1883 & d’Ivan Morozov 1903

Mais, un des premiers, il porta un intérêt particulier à des artistes russes tels Vroubel, Somov, Golovine, Levitan et Maliavine, y compris des modernes comme Chagall, Mikhaïl Larionov et Natalia Gontcharova.

                
Kasimir Malevitch Autoportrait 1910
Michel Larionov, Portrait de sa femme Natalia Gontcharova, 1907
Natalia Gontcharova Vergers en automne 1909

Il suivit des cours de dessin et de peinture qui lui donnèrent une bonne appréhension de la technique picturale et exerça son œil d'expert. En 1903, les deux frères sont à Paris pour leurs premiers achats, notamment La Gelée à Louveciennes d’Alfred Sisley chez Durand-Ruel. Il y reviendra fréquemment, au Salon des indépendants en avril et au Salon d’automne en octobre où il acquit en particulier le Portrait de Jeanne Samary de Renoir en 1904 et quatre Monet.

                    
Constantin Somov Arc en ciel     Constantin Makovski Varvara Morozova
Marc Chagall Maison bleue 1914

Il entre aussi très tôt en relation avec Ambroise Vollard, lui achetant La Grenouillère de Renoir en 1908. En 1906, c'est l'année de l’exposition au Salon d’automne de « Deux siècles de peinture et de sculpture russes » présentée par Serge Diaghilev où Ivan découvre les œuvres de Maurice Denis.

                 
Pierre Bonnard La Méditerranée 1911    Maurice Denis L'histoire de Psyché, 1908-09

C'est le coup de foudre et il lui commande le décor de son salon de musique à Moscou – onze panneaux sur « l'Histoire de Psyché », au style classique et aux tonalités surprenantes, très différent du style de ses contemporains.

           
Camille Claudel L’abandon 1886                Paul Sisley Gelée à Louveciennes 1873

Dans un tout autre genre, il va aussi acquérir onze toiles de Gauguin, plusieurs Van Gogh auprès d’Eugène Druet, dont La Vigne rouge, La Ronde des prisonniers et Paysage d’Auvers après la pluie.
Dans le même temps, il découvre avec ravissement Paul Cézanne, achetant vingt de ses œuvres, dont quinze chez Vollard.

                       
Paul Cézanne La montagne Sainte-Victoire 1896-98 et Les Grandes baigneuses, étude, 1892

De Pierre Bonnard à Henri Matisse

Ivan Morozov eut aussi un coup de coeur pour Pierre Bonnard. Il l'enthousiasme tant qu'il lui commande un triptyque, La Méditerranée, pour l’escalier de sa maison moscovite. Présenté au Salon d’automne de 1912 avant d’être envoyé en Russie, il fut complété par deux autres panneaux, Automne, la cueillette des fruits et Début de printemps. Le portrait du collectionneur par Valentin Serov montre en arrière-plan Fruits et bronze, une toile de Matisse qui date de 1910 qu'Ivan Morozov va acheter avec une autre toile "Nature morte à la danse".

           
Henri Matisse Nature morte à la danse 1909 et Fruits et bronze 1910

Au printemps 1920, la collection Morozov a été nationalisée après la révolution soviétique et Ivan s’est réfugié en Suisse, Il est interviewé par le critique d’art Félix Fénéon et se flattera que ses 240 toiles d'artistes français, soient intactes et soient le « deuxième musée d’art occidental », vantant cet art venu de France auprès de ses compatriotes, comme à l'époque où la cour de Russie parlait le français…

                        
Paul Cézanne, Nature morte au rideau 1898 et Pêches et poires 1895

Notes et références
[1] Certains des peintres russes sont aussi représentés dans la à la collection Chtchoukine où on peut voir des tableaux de Kasimir Malevitch, Alexandre Rodtchenko, Michel Larionov, Vladimir Tatline, Lioubov Popova et Olga Rozanova.

Voir mes fiches sur les peintres cités :
► Renoir Au Grand Palais -- Renoir A Essoyes -- Expo Montélimar, De Renoir à Picasso --
► Renoir, Vie et oeuvre -- Van Gogh, La nuit étoilée -- Monet, Marines & paysages --
► L'École russe de Vitebsk et Marc Chagall --
► André Derain -- Camille Claudel à Nogent --

Voir aussi
► Diaporama, Collection Morozov.

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