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Frachet
10 août 2020

Stefan Zweig Magellan

Référence : Stefan Zweig, "Magellan", 1938, réédition chez Robert Laffont, 360 pages, février 2020

         

Magellan ou Fernnāo de Magalhāes (1480-1521), avant d'être un aventurier, est d'abord un homme, un portugais qui a réussi en peu de temps à convaincre le roi d'Espagne Charles Quint de souscrire (et de financer) à un projet a priori irréaliste reposant sur l'idée qu'il existe un passage entre l'océan Atlantique et l'océan Indien. Son idée est d'atteindre les Îles des Épices [2], non par la route classique, celle de l'est contournant l'Afrique, mais par l'ouest en contournant l'Amérique.

« Donnez-moi une flotte, dit-il au roi avec un culot phénoménal, et je vous le montrerai et je ferai le tour de la terre en allant de l'est à l'ouest. » Il a aussi la réputation d'être un homme difficile, austère, taciturne et fier. Excellent  marin et soldat aguerri, il sait fort bien que pendant tout le voyage, il devra maîtriser les intrigues, naviguer entre les trahisons et les complots et aux  trahisons, juguler les ambitions. Tout un programme.
Il savait aussi que savoir lire dans les tréfonds de l'âme humaine est aussi essentiel que savoir lire une carte maritime.

         

L'expédition, rapidement organisée,  appareilla l'année suivante en 1519 [1] et naviguera pendant près de trois ans, réduite à un seul bateau mais qui aura atteint son objectif. Le mardi 20 septembre 1519, cinq navires quittent le port de Séville avec 265 marins, mais seulement dix-huit survivants seront de retour.

Parmi tous les anonymes, les marins dont la plupart ne reviendront pas, émergent l'esclave Henrique venu des Îles des Épices ou le chroniqueur Antonio Pigafetta qui relata dans ses carnets le menu de l’expédition.
Magellan lui-même ne connaîtra pas la joie de savourer son succès, il est mort avant le retour de l'expédition et n'aura pas le bonheur d'étreindre dans ses bras sa femme Béatrice et ses deux fils sur le quai du port de Séville.

        
La terre de feu et le détroit de Magellan      Illustration du voyage, La vie sur le bateau

Ce ne fut pas vraiment une partie de plaisir, étant marquée par des cartes approximatives qui ne facilitaient pas la navigation, des mutineries vues les conditions de travail des matelots, le froid, la faim et les maladies, maintes péripéties engendrant découragements et combats inutiles . Mais Magellan, malgré tous les aléas, a réussi à passer le détroit qui porte son nom et à déboucher sur l'océan Pacifique, alors inconnu.

Nous en apprenons aussi beaucoup sur l'avidité des européens, pas vraiment pris de scrupules pour piller, s'emparer des richesses des Amériques, réduire en esclavage les populations locales.

Pour Stefan Zweig, il s'agit d'une aventure humaine extraordinaire et exemplaire dont il dit que c'est « une idée animée par le génie et portée par la passion [...] et un homme, avec sa petite vie périssable, peut faire de ce qui a paru un rêve à des centaines de générations une réalité et une vérité impérissables. »

        

Dans un autre ordre d'idée, il se demande pourquoi cet exploit nous ai parvenu. L’Histoire en fait est pour lui « seulement la petite partie d'entre les événements  passés dans l'œuvre des poètes ou des savants. Que serait Achille sans Homère» Il pense que sans les historiens et les artistes, « les plus grandes figures resteraient à tout jamais ensevelies dans l'ombre et les prouesses les plus héroïques tomberaient irrévocablement dans la mer insondable de l'oubli. »

      
Le port de Séville au XVIème siècle                 Gravure de 1807 : le Victoria à Séville

Notes et références
[1] Le 10 août 1519, le San Antonio, le Trinidad, le Conception, le Victoria et le Santiago « descendent vers San Lucar de Barrameda où le Guadalquivir débouche en pleine mer. »
[2]
Les Îles des Épices, îles Moluques aujourd'hui, se situent en Indonésie entre les Célèbes et la Papouasie à l’est.

Voir mes fiches sur l'auteur
* Présentation de Stefan Zweig : Zweig par Dominique Bona, Fouché et Romain Rolland par Stefan Zweig et Les derniers jours de Stefan Zweig par Laurent Seksik --
* Stefan Zweig, Clarissa -- Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen (1944)
* Stefan Zweig, Fouché -- Biographie de Joseph Fouché
* Stefan Zweig, É
crits politiques -- Articles et Correspondance 1897-1919 et 1910-1919
* Les écrivains de langue allemande -- Magellan, Carnet de voyage --

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<< Christian Broussas, Zweig, Magellan 10/08/2020 © • cjb • © >>
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